Une réalité angoissante sans logique pousse au déni.

Une réalité décrite en continu par un double discours, où tout est dit ET son contraire, crée une dissonance cognitive dans l’esprit des personnes. Elles deviennent incapables de déterminer ce qui est « vrai ». Le déni permet alors de diminuer le niveau de tension interne : puisqu’il est impossible de trouver une logique, on se protège par le déni. La remise en question, penser même est quelquefois impossible, et c’est l’angoisse. Alors, pour se protéger, il ne reste plus que le déni et on peut ainsi rapidement être amené à adopter des positions binaires de type pour/contre

Le déni, c’est le mécanisme de protection psychologique.

Il est souvent utilisé par les victimes de violences et d’abus, car il protège le psychisme d’un effondrement dépressif. Plutôt que de faire face à l’agression et donc à l’agresseur, la personne préfèrera se dire qu’elle interprète mal les choses, qu’elle a mal compris les intentions de leur agresseur, et que finalement, il n’a rien fait de mal ! C’est la seule façon pour elle de se sentir en sécurité…cela peut continuer jusqu’au drame. A ce moment, la personne prend conscience du danger, que sa vie est en jeu, et qu’elle doit cesser d’accepter et se défendre.

Pourquoi est il beaucoup plus difficile d’admettre qu’on est une victime, plutôt que de nier la réalité ? Parce qu’il est psychiquement nécessaire que la réalité devienne plus angoissante que l’angoisse de base, pour réagir, car la peur paralyse.

Autre mécanisme utilisé dans un système pervers, celui de la double contrainte ou injonction paradoxale.

Il s’agit d’être soumis à 2 injonctions totalement contradictoires, par exemple, « sois spontané ! ».

Aucune faute ne peut être imputée à un pervers. Si les injonctions contradictoires ne fonctionnent pas, si les stratégies illogiques et irrationnelles ne fonctionnent pas, si une communication incohérente ne fonctionne pas, ce sera toujours à cause de ceux qui ne veulent pas se plier aux désirs du pervers !

Du coup, s’opposer à un système pervers c’est accepter d’être désigné comme coupable.

Et encore un mécanisme utilisé par le pervers, la perversion des mots, c’est à dire dévier les mots de leur sens.…comme disait A Camus «  mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde ».

La manipulation des faits et la projection.

Le pervers ne s’embarrasse ni de la logique, ni de la réalité. Le pervers est dans un délire de toute puissance, ce qu’il pense devient réalité. Il peut ainsi décider de faire croire que s’il a trompé, menti, c’est pour le bien commun…et à force de le répéter, il peut réussir à le faire croire ! C’est ce qu’on appelle la «folie blanche» et la «projection» : au niveau psychologique, un pervers est en fait quelqu’un qui, pour ne pas sombrer dans la folie, va la projeter. Le fou ce n’est donc pas lui mais l’Autre !

A force de chercher la logique dans un fonctionnement pervers, on peut devenir réellement fou !

Cela peut expliquer le comportement de nombreuses personnes dans un système géré par un pervers, qui est donc devenu un système pervers.

Les membres du système pervers sont victimes de ce mécanisme de projection. Le responsable du système, incapable d’accepter sa propre folie, la renvoie sur le groupe. Et ceux qui ne peuvent pas voir là de la manipulation psychologique tombent dans le panneau et deviennent fous à leur tour.

Tout ce qu’un pervers est, pense et ressent, il le renvoie sur ses victimes. Quand il s’agit d’un particulier, le phénomène est très limité. Mais quand il s’agit d’une personne de pouvoir, d’un leader, les conséquences peuvent être dramatiques.

Comment, dans un système géré par un pervers, ou perverti, faire sortir les personnes du déni ?

Certaines personnes le comprennent trop tard : il très difficile d’accepter que l’on se soit fait manipuler. Et ce n’est pas simplement à cause de l’égo mais aussi, et surtout, à cause de l’angoisse que cela génère. La victime de violence physique peut décider de fuir dès qu’elle se rendra compte de la situation. La victime d’un pervers pense souvent n’avoir nulle part où fuir, aucun moyen de sortir de la zone d’influence du pervers.

Comme déjà évoqué, il ne reste à la « victime » qu’à s’enfermer dans le déni pour se protéger de la réalité…avec comme conséquence celle de soutenir le système pervers jusqu’au bout, quitte à risquer sa vie, quitte à faire et dire des choses qui ne nous ressemblent pas. Le déni devient le seul moyen pour se protéger

  1. de la réalité,
  2. de l’angoisse qui serait générée par la fait d’envisager la réalité, l’angoisse qui ronge et qui menace de se manifester à chaque instant.

Alors, comment aider à la prise de conscience ?

Une personne dans le déni ne cherche pas à s’informer car elle connaît la réalité, elle essaie simplement de s’en protéger. Mais la personne est à considérer comme une « victime » qui a différents besoins (même si elle ne peut les exprimer) :

– besoin d’avoir des informations sur les mécanismes de la manipulation,

– besoin de comprendre que ce qu’elle ressent est légitime,

– besoin d’entendre qu’elle n’est pas réellement folle, pour pouvoir redonner sa folie apparente à la personne à qui elle revient de droit,

– besoin de beaucoup de soutien, car c’est un chemin extrêmement difficile que celui de la prise de conscience.

Pour faire sortir quelqu’un du déni inutile de le menacer. Au contraire il s’agit de le rassurer, écouter, qu’il s’agisse de doutes, d’interrogations ou d’objections.

Accompagner une personne /groupe à sortir du déni : un processus par étapes.

Il s’agit d’un travail absolument titanesque, mais qui est possible grâce à la compréhension, à la douceur, à l’empathie.

La personne qui est dans un déni profond est comme « bloquée » dans une à dire une angoisse difficile à appréhender. Elle a peur de la réalité, ou plutôt de ce que la réalité pourrait lui faire ressentir. Inutile d’essayer de la réveiller, elle sait déjà tout !

  • La meilleure chose à faire est d’aider à faire accepter la réalité et de trouver une issue à sa situation.
  • être là, sans oublier que les comportements observés chez la personne sont une projection des actes et paroles des personnalités perverses qui la manipulent (gouvernent).
  • d’être compatissant, « se mettre à sa place » pour comprendre, de manière individuelle, quelles sont ses peurs, et quels seraient les meilleurs moyens pour parvenir à lui faire reprendre conscience de la réalité.
  • dans un groupe, tous les membres n’ont pas les mêmes raisonnements, capacités ou aptitudes. Pour certains ils ne peuvent se sentir en sécurité qu’en faisant ce qu’on leur demande. Obéir devient alors un moyen de se sentir un peu moins en danger, même après avoir pris conscience de la situation.

 

C’est un travail d’accompagnement, pour lesquels on peut utiliser des outils et des techniques mais c’est surtout la compréhension, la douceur, l’écoute empathique qui seront utiles.

Il s’agit de faire preuve d’empathie en acceptant la vulnérabilité, pour soi et pour l’autre.

                                                                                                                                                                        Brenée Brown